Ethereum (ETH) : Qu'est-ce qui attend le protocole et son token ?

Ce qu'il faut savoir 🐳

Ethereum est de loin la blockchain possédant le plus de valeur verrouillée (60 milliards de dollars).

Son développement se focalise aujourd'hui sur ses layers 2, afin de les rendre plus performants et d'améliorer la scalabilité globale de l'écosystème.

Ethereum intègre une philosophie singulière dans le secteur crypto. Il emprunte à la fois la vision de Bitcoin, qui privilégie la sécurité à la scalabilité, tout en cherchant à innover via ses layers 2 pour favoriser la performance. Ces deux orientations, sur le papier inconciliables, sont parfois difficiles à comprendre.

Présentation générale 🧬

La blockchain Ethereum a été officiellement lancée en juillet 2015.

Le réseau était initialement sécurisé par la preuve de travail (PoW) et a ensuite adopté la preuve d’enjeu (PoS) en septembre 2022 lors de la mise à jour “The Merge”.

À son lancement, Ethereum était la première blockchain Turing-complète, c’est-à-dire capable d’exécuter n’importe quelle fonction. Cela est rendu possible grâce à l’Ethereum Virtual Machine (EVM), un environnement d’exécution dont le langage de programmation le plus populaire est Solidity.

Chaque opération sur le réseau Ethereum nécessite de payer des frais de gaz. Plus l’opération est complexe, plus le nombre de gaz nécessaire augmente. En plus de cela, le prix du gaz évolue en temps réel en fonction de l’activité du réseau. Si ce dernier est congestionné, alors le prix du gaz sera plus élevé.

Le débit d’Ethereum est limité en raison de la grande décentralisation de son réseau. Le choix de ne pas exiger de matériel onéreux pour opérer les nœuds favorise la présence de nombreux validateurs, impliquant un système de consensus plus lourd.

Pour combler ce manque de débit, la communauté Ethereum souhaitait à l'origine intégrer le “sharding” afin de diviser la blockchain en plusieurs sous-réseaux capables d’assurer un plus grand nombre de transactions en parallèle. Cependant, le sharding implique de nombreux défis de sécurité et d’interopérabilité, ce qui a poussé la communauté à pivoter vers une roadmap centrée sur les layers 2.

Les layers 2 sont des blockchains construites au-dessus d’Ethereum et qui héritent de ses propriétés de sécurité. Ethereum peut ainsi se concentrer sur la décentralisation et la sécurisation de son réseau, tandis que les layers 2 s’occupent d’optimiser le débit de leurs transactions et de réduire leurs frais. Pour assurer leur sécurité, les layers 2 se contentent de payer Ethereum pour y publier leurs transactions.

Financement 💰

Ethereum a été financé par une initial coin offering (ICO) qui a récolté 31.591 bitcoins, d'une valeur d’environ 18,5 millions de dollars à l'époque.

Équipe et communauté 👾

L’équipe fondatrice d’Ethereum compte plusieurs personnalités connues de l’écosystème crypto, notamment Charles Hoskinson (qui a ensuite fondé Cardano), Gavin Wood (qui a ensuite fondé Polkadot) et Joseph Lubin, désormais PDG de ConsenSys, la société à l’origine du wallet Metamask et du layer 2 Linea.

Vitalik Buterin est l’un des seuls membres fondateurs qui continue de travailler activement sur le développement du protocole Ethereum.

Aya Miyaguchi est la directrice exécutive de la Fondation Ethereum depuis 2018. Elle travaillait auparavant en tant que responsable de la zone Japon chez la plateforme d’échange Kraken.

Bien que la Fondation Ethereum continue de jouer un rôle important dans le développement d’Ethereum, diverses communautés et individus y participent également.

La Fondation Ethereum possède 3,4 millions de followers sur X.

Fonctionnement ⛓️

Ethereum repose sur la preuve d’enjeu (PoS). Pour participer à son fonctionnement, les validateurs doivent bloquer 32 ETH. Toutes les 12 secondes, un validateur est sélectionné pour proposer un bloc valide.

Si un validateur tente de corrompre le réseau, les ETH qu’il aura bloqués seront “slashés”, c’est-à-dire détruits.

Les validateurs sont rémunérés par trois composantes majeures : l’émission de nouveaux ETH, les frais de transactions, et la MEV (Maximum Extractable Value), qui consiste à ordonner les transactions d’un bloc de façon optimale.

La mise à jour Dencun, qui a eu lieu en mars 2024, a introduit les “blobs” sur le réseau Ethereum. Ils permettent le stockage de données de façon temporaire pour deux semaines. Cela permet aux layers 2 d’Ethereum de rendre disponibles les données de leurs transactions pendant une période suffisamment longue pour s’assurer de leur validité.

Avant cela, les layers 2 devaient poster ces données sur Ethereum de manière définitive, ce qui leur coûtait bien plus cher (car c’était irréversible). Ce système de stockage temporaire permet ainsi d’améliorer l’efficacité du réseau sans faire croître le poids de la blockchain et évite donc d’augmenter les contraintes techniques des validateurs.

Écosystème 🤝

Ethereum possède de loin l’écosystème d’applications le plus varié que ce soit en finance décentralisée (DeFi), avec ses collections de NFT et les applications tournées vers le grand public.

> Lire notre rapport sur l’état de la DeFi d’Ethereum pour plus de détails

Comme de nombreuses blockchains sont basées sur l’EVM, les applications créées sur chacune de ces chaînes peuvent ensuite être facilement déployée sur une autre chaîne EVM. Jusqu’à présent, la quasi totalité des grandes innovations du secteur sont nées au sein de l’écosystème EVM.

Solidity reste de loin le langage de programmation avec la plus grande communauté de développeurs au sein de l’écosystème crypto et possède nombreuses ressources qui facilite le développement de nouvelles applications.

La force d’Ethereum est que l’ensemble des projets qui construisent des layers 2 contribuent à la recherche et au développement de solutions pour améliorer les performances de l’écosystème. La grande diversité de projets favorisent également la décentralisation globale d’Ethereum.

Par ailleurs, l’augmentation du nombre de layers 2 et de leurs performances se traduit par une hausse de la valeur captée par les validateurs d’Ethereum.

Les layers 2 actuels les plus populaires sont Arbitrum (lire notre analyse) et Base (lire notre analyse).

Le nombre de layers 2 ne cesse d’augmenter de plus en plus vite grâce à la multiplication d’outils qui facilitent leur déploiement.

Actuellement, la plupart des layers 2 sont des blockchains généralistes basées sur l’EVM et n’ont pas beaucoup d’éléments différenciants.

Parmi les futurs layers 2 innovants on peut nommer :

• Eclipse qui intègre la Solana Virtual Machine (SVM)
• Movement qui intègre le langage Move, utilisé sur les blockchains Sui et Aptos
• MegaETH qui souhaite créer la première blockchain “en temps réel”, c’est à dire sans latence
• Nil qui couple les zero-knowledge proofs au sharding afin de créer un layer 2 capable d’augmenter ses performances en fonction de l’activité du réseau

Défis 🥵

De nombreuses critiques reprochent aux développeurs d’Ethereum d’avoir une approche et un discours trop orientés vers la recherche, déconnectés de l’utilisateur moyen.

L’ambitieuse et complexe roadmap d’Ethereum rend difficile la diffusion d’un message simple et accessible.

Le choix d’une roadmap centrée sur les layers 2 crée plusieurs problèmes, notamment des problèmes d’interopérabilité qui dégradent l’expérience utilisateur, tandis que leur sécurité dépend encore beaucoup des équipes qui les développent.

Le succès de Solana illustre bien ce problème : il est beaucoup plus facile d’utiliser Solana car toutes les opérations se déroulent sur la même couche.

Il sera crucial pour la communauté Ethereum de rendre les communications entre les différents layers quasi invisibles pour les utilisateurs.

Le token ETH 🌕

ETH sert à sécuriser le réseau Ethereum à travers le staking. Actuellement le staking d’ETH offre un rendement annuel d’un peu plus de 3%.

Depuis l’implémentation de l’EIP-1559 en août 2021, une partie des frais de transaction du réseau Ethereum est brûlée, c’est à dire détruite. Ainsi, plus le réseau Ethereum est utilisé plus le burn d’ETH est élevé.

Le passage à la preuve d’enjeu en septembre 2022 a ensuite drastiquement réduit les émissions d’ETH, ce qui a permis à ETH de devenir déflationniste : il y a plus d’ETH détruits que de nouveaux ETH émis.

On constate néanmoins une reprise inflationniste depuis la mise à jour Dencun en mars 2024. Celle-ci a permis de réduire les frais payés par les layers 2 à Ethereum pour décongestionner le réseau et les rendre plus efficaces. Le point négatif, c’est que cela a fortement réduit le nombre d’ETH brûlés.

Actuellement, ETH possède une inflation annuelle d’environ 0,6 % (que l’on peut mesurer sur le site Ultrasound Money). Une augmentation de l’activité sur Ethereum ou ses layers 2 pourrait permettre de retrouver une logique déflationniste.

Réglementation ⚖️

Il a longtemps subsisté un doute sur la qualification juridique de l'ETH aux États-Unis, principalement car il résulte d'une levée de fonds. Certaines voix de la SEC ont tenté de le présenter comme un titre financier non enregistré, mais plusieurs conflits juridiques (principalement avec ConsenSys) ont récemment conduit à un abandon des poursuites à ce sujet.

De plus, les dossiers d'ETF ETH déposés à Wall Street par des acteurs comme BlackRock et Fidelity ont été acceptés par le régulateur sous la dénomination "commodity" (matière première ou marchandise), tout comme Bitcoin.

Le mécanisme du staking reste néanmoins encore en suspens.

Roadmap 🗺️

La prochaine mise à jour d’Ethereum nommée Pectra est prévue pour début 2025. Elle permettra notamment :

• La mise en place du PeerDAS pour améliorer le stockage des données des blobs entre les validateurs : chaque validateur pourra ne stocker qu’une fraction des blobs, augmentant ainsi la quantité totale de données stockées et réduisant les coûts des layers 2.
• L'augmentation de la quantité maximum d’ETH qui pourra être stakée par les validateurs, passant de 32 à 2048 (le minimum restant à 32) pour réduire le nombre de validateurs sur le réseau et améliorer son efficacité.
• L'amélioration des smart wallets avec la possibilité de grouper plusieurs transactions en une seule.
• La préparation pour l’implémentation des “verkle trees” lors de la mise à jour suivante, permettant aux validateurs de ne plus avoir à stocker l’intégralité de la blockchain et réduisant ainsi leurs contraintes techniques.
• La mise en place de l’EVM Object Format (EOF), une amélioration de l’EVM pour renforcer la sécurité des smart contracts sur Ethereum et ses layers 2 et faciliter leur développement.

Outre les développements de la blockchain elle-même, l’écosystème Ethereum dans son ensemble connaîtra aussi plusieurs évolutions.

L’une de ces évolutions est le développement des “based rollups” encouragé par la Fondation Ethereum. Ces layers 2 ont pour avantage d’hériter pleinement des propriétés de résistance à la censure d’Ethereum et d’être parfaitement interopérables avec ce dernier.

Taiko est pour l’instant l’unique based rollup déjà en fonction. Cependant, ce système souffre encore de nombreuses difficultés et nécessite l’implémentation des “based pre-confirmations” pour garantir l’inclusion des transactions du rollup au sein de la L1 sans attendre que son état soit finalisé.

Concurrence ⚔️

Ethereum ne possède pas vraiment de concurrents directs. Les projets qui se sont décrits comme des “Ethereum killers” n’ont pas survécu à l’épreuve du temps.

Toutefois, on peut noter le retour en force de Solana, qui ne cherche pas directement à remplacer Ethereum, mais à proposer une vision alternative. La force de Solana est d’offrir une expérience utilisateur plus simple en ayant tout sur une seule chaîne.

La contrepartie est que Solana sacrifie sa décentralisation, puisque les énormes contraintes techniques des validateurs les poussent à être tous localisés dans des data centers.

L’approche de Solana est pragmatique à court et moyen terme, car elle offre actuellement une meilleure expérience utilisateur et possède une équipe de développement plus centralisée qui réagit rapidement aux problèmes.

Au-delà de ça, on peut se demander jusqu’à quel point une unique blockchain peut supporter de grandes quantités de transactions, comme on a pu le voir lors des nombreuses pannes du réseau.

Ci-dessous, la répartition de la valeur bloquée au sein des différentes blockchains.

L'analyse marché de Chadi El Adnani, Head of Content & Research de SUN ZU Lab 📈

ETH est un géant hors-catégorie en termes de liquidité sur les bourses crypto centralisées. Les volumes quotidiens se situent depuis le début de l'année entre 2 et 6 milliards de dollars, atteignant même 10 milliards de dollars début mars. La profondeur de marché cumulée moyenne à 50 bps s'élève à 45 millions de dollars sur les principaux CEXs. ETH partage ces caractéristiques uniquement avec le Bitcoin (BTC) et les instruments financiers les plus liquides en TradFi, tels que certains ETFs (S&P 500 par exemple).

Revenant de moins de 1000 dollars en juin 2022, ETH a terminé l'année 2022, marquée par l'implosion de FTX, autour de 1200 dollars. L'année 2023 a été celle du rebond, permettant à ETH de doubler de prix et de terminer autour de 2300 dollars. En 2024, après un mois de janvier marqué par une certaine confusion sur la direction des marchés crypto suite à la validation des ETFs spot BTC, ETH s'envole et dépasse la barre symbolique des 4000 dollars début mars. Il l'a frôlée une deuxième fois en mai suite aux rumeurs de la validation des ETFs spot Ether. ETH s'échange actuellement autour de 3300 dollars, avec une performance de 45% en 2024.

Nous soulignons la corrélation presque parfaite entre la performance de ETH et celle de BTC tout au long de l'année, démontrant que les investisseurs traitent toujours ces deux actifs de la même manière, malgré leurs fondamentaux très différents. Cette perception semble avoir été consolidée avec la validation des ETFs spot en 2024 et l'entrée en masse des institutionnels.

L'avis de The Big Whale 🐳

Ethereum est dans une position difficile puisqu’il se trouve entre Bitcoin, qui adopte une approche minimaliste en termes de performances et de possibilités pour privilégier la sécurité, et Solana, qui maximise la performance en sacrifiant la sécurité.

Cette difficulté à articuler un discours uni et accessible à tous peut représenter un frein à l’attraction de nouveaux utilisateurs.

D’un autre côté, cela correspond à la vision centrée sur les layers 2, qui doivent devenir le point d’entrée de ces nouveaux utilisateurs. Base en est le parfait exemple et parvient à accélérer l’embarquement d’utilisateurs sur la blockchain grâce à l’immense capacité distribution de Coinbase.

L’autre avantage des layers 2 est qu’ils permettent aux projets qui les construisent d’innover sans être bridés par les évolutions d’Ethereum. Grâce à cela, l’écosystème Ethereum connaît une explosion d’innovations qui peuvent ensuite être répliquées.

Les critiques qui reprochent aux contributeurs du réseau d’Ethereum d’être trop orientés vers la recherche et de ne pas être assez pragmatiques omettent l’aspect fondamental des blockchains, qui est de permettre de transférer et stocker la valeur en toute sécurité.

Ethereum parvient à innover non seulement pour améliorer ses performances, mais aussi pour renforcer sa sécurité. Cette évolution s’inscrit dans une vision à long terme capable de s’adapter au fur et à mesure pour intégrer les nouvelles avancées technologiques.

Les prochaines étapes clés au sein de son écosystème seront l’amélioration de la sécurité de ses layers 2 ainsi que le développement de l’abstraction de chaîne, qui vise à effacer la friction créée par un monde multichain et offrir la meilleure expérience utilisateur possible.

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