The Big Whale : Après Nike, Lacoste, Renault, Michelin se lance à son tour dans le Web3. Pourquoi ?
Téo Bertrand : Il y a plusieurs raisons. La première, c’est que Michelin est un groupe qui a toujours accompagné sa communauté, que ce soit sur les routes avec les pneus et les cartes ou dans les restaurants avec le Guide. Il faut donc continuer d’avoir ce rôle de guide dans des univers nouveaux comme celui des NFTs et du web3.
La seconde raison, c’est que nous sentons bien que notre communauté veut plus d’échanges avec la marque. Aujourd’hui, quand vous achetez des pneus, vous passez très souvent par un distributeur, quand vous allez dans un restaurant étoilé, il n’y a pas de lien direct avec le Guide et la marque. Avec le "Michelin 3xplorer Club" et les NFTs, nous allons pouvoir créer ce lien plus direct.
À quel moment avez-vous décidé de lancer le projet ?
Les réflexions ont démarré début 2022. Il a d’abord fallu un temps d’acculturation. Tout le monde ne maîtrise pas le vocabulaire et la technique liés aux NFTs, puis nous avons décidé d’y aller.
Est-ce que cela a été facile de convaincre en interne ?
2022 a marqué une bascule. Toute l’entreprise a pris conscience de l’importance du sujet, des équipes au comité de direction. Le projet a été bien accueilli assez vite. Après il fallait le mettre en place.
Et justement ce projet. Quel est-il ? À quoi ces NFTs vont-ils servir ?
Notre collection de NFTs, qui sera vendu autour du 15 juin, repose sur deux choses.
D’abord la dimension visuelle. Nous allons revisiter le Bibendum comme jamais. C’est une vraie fierté parce que ce n’est pas simple de toucher à un personnage aussi iconique.
Puis il y a la dimension communautaire : chaque détenteur de NFT aura accès à des avantages spécifiques via des tirages au sort pour gagner des expériences exclusives. Il n’y aura pas que des tickets d’entrée, mais des expériences Michelin.
Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire ?
Nous sommes partenaires de nombreux événements comme le championnat de moto GP. Les détenteurs de NFTs pourront assister aux courses, sans doute rencontrer les pilotes. Il y a aussi les activités liées au Guide. Nous aurons des invitations pour les restaurants étoilés, pour les cérémonies de remise des étoiles.
Il y aura aussi des journées dédiées à l’entreprise Michelin avec visites des usines, du musée. L’objectif est vraiment de proposer des expériences comme nous n’en avons jamais proposé.
A-t-on vraiment besoin des NFTs pour faire ce genre de choses ?
C’est une bonne question. Notre objectif est vraiment de cibler les fans de Michelin. Les NFTs et les quêtes que nous allons mettre en place vont nous permettre de tester la volonté des fans de vraiment venir à nos événements et de les rendre acteurs. Le but n’est pas de vendre les NFTs à n’importe qui. Les NFTs ne sont pas une fin, mais un moyen.
N’y a-t-il pas un risque de spéculation sur vos NFTs ?
C’est impossible de totalement maîtriser ce facteur, mais le timing montre bien qu’il n’y a pas d’approche spéculative. Nous ne lançons pas un tel projet pour gagner de l’argent, mais pour impliquer des fans de la marque.
Comment avez-vous conçu la collection ?
Comme la plupart des entreprises, nous n’avions pas l’expertise web3 en interne, donc il a fallu trouver les bons partenaires, qui partagent les mêmes valeurs et la même vision de la marque.
Les avez-vous trouvés ?
Franchement, nous pensons que oui. Nous avons travaillé avec Bulldog, Exclusible, Goëland Studio, NFT Morning et d’autres. Ces partenaires disposent des codes de l’univers web3, ce qui est un vrai avantage.
En parlant d’univers, quel type de population visez-vous avec ces NFTs ?
L’objectif est de démocratiser le Web3. Nous savons très bien que nos NFTs vont attirer un public averti, mais nous voulons aussi toucher des passionnés de Michelin qui ne connaissent pas ces sujets. Une fois que la collection sera disponible, nous allons nouer des partenariats avec d’autres collections et d’autres marques.
Pour la blockchain, vous avez choisi Ethereum. Pourquoi ?
Ethereum est l’une des plus importantes blockchain. Elle s’est imposée dans l’univers des NFTs, et le changement de son algorithme de consensus avec le passage à la preuve d’enjeu a été un vrai argument. Ethereum a fortement baissé sa consommation énergétique (lire notre dossier) qui est un grand sujet pour Michelin.
Vous auriez pu choisir une blockchain “française” comme Tezos …
Ethereum est leader sur le secteur.
Quel est le prix des NFTs ?
Le prix peut encore changer, mais nous devrions être autour de 0,1 ether (un peu moins de 200 euros au cours actuel). L’objectif était de mettre un prix accessible pour le plus grand nombre. Nous ne voulons pas juste avoir un club de privilégiés.
5000 NFTs, c’est assez limité vu le nombre de clients potentiels, mais c’est un début. Avec une communauté de 5000 personnes, on peut créer un lien privilégié, on peut tester des choses.
Comment allez-vous vendre les NFTs ? Avez-vous une stratégie spécifique ?
Nous avons lancé le compte Twitter du Michelin 3xplorer Club, et nous allons bientôt avoir un Discord pour gérer la communauté avec un channel dédié pour les détenteurs de NFTs.
L’idée sur les prochaines semaines est de pouvoir échanger avec la communauté, savoir ce que les fans veulent. Il va y avoir des partenariats avec d’autres collections comme Renault ou Alpine. Nous travaillons aussi avec des communautés proches de la gastronomie.
Quel budget avez-vous eu en interne ?
Il n’y a pas eu de contraintes budgétaires, mais le but est d’arriver au moins au point mort.