Dans le sillage de la généralisation de la tokenisation des actifs financiers, la France place ses pions en Europe. Ce jeudi, la Caisse des dépôts a émis pour 100 millions d'euros d'obligations à 10 ans tokenisées qui doivent servir aux besoins de financement du groupe.
Ces obligations tokenisées ont été émises via D-FMI, la plateforme de règlement des titres d'Euroclear, plus grand acteur dans le domaine du règlement/livraison au niveau mondial. Le règlement a été assuré par DL3S, un type de blockchain permissionnée développée par la Banque de France, sur laquelle peuvent circuler des monnaies numériques de banque centrale (MNBC) et des stablecoins réglementés.
BNP Paribas, la plus grande banque de la zone euro, a servi d'agent émetteur et payeur, tandis que CACIB, la banque de financement et d'investissement de Crédit Agricole, et Natixis, banque d'investissement et de financement du groupe BPCE, ont agi comme négociants.
Autre point notable : ces obligations émises directement sur une blockchain respecte la loi française sur les titres au porteur et ont été cotées à Euronext, principale Bourse européenne. Une première.
« L’admission à la négociation des titres, grâce à l’implication d’Euroclear, résout le problème du manque de liquidité et lève un gros point de blocage dans ce marché naissant », précise Frédérick Lacroix, avocat associé pour le cabinet Clifford Chance qui a travaillé sur cette émission.
L'ensemble de ces acteurs a été réuni par Paris Europlace, une association qui compte plus de 600 acteurs de l'écosystème financier français et qui a parmi ses objectifs la promotion de la place financière de Paris.
« Le fait qu'autant d'acteurs financiers de premier plan s'allient pour réaliser ce type de transaction est très positif pour le développement d'une collaboration commune dans l'optique de la tokenisation des actifs financiers à venir », explique à The Big Whale Stéphanie Lheureux, directrice des actifs digitaux chez Euroclear.
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Imposer son standard Alors que le développement de la finance décentralisée (DeFi) et l'adoption des cryptomonnaies n'ont cessé de s'accélérer ces dernières années, les autorités monétaires ont lancé de grands chantiers pour ne pas se laisser distancer.
Cette opération s'inscrit dans le cadre des expérimentations menées actuellement par la Banque centrale européenne, incluant notamment une monnaie numérique de banque centrale qui servirait d'actif de règlement et dont le lancement ne fait désormais plus guère de doute.
Dans cette course, la BdF fait partie des banques centrales les plus avancées sur les sujets de tokenisation en Europe et pousse pour une refonte complète des infrastructures financières, où sa blockchain DL3S tiendrait un rôle central.
Son adoption permettrait également à la France d'imposer son standard au niveau européen.
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Reste également à savoir quelle place prendront les blockchains publiques, c'est-à-dire accessibles sans restriction, notamment comme Ethereum, dans ce grand changement d'infrastructure.
Actuellement, elles restent encore largement inutilisables à grande échelle à cause du manque de confidentialité, de scalabilité, mais aussi de transparence dans la formation des frais de transaction.
Autant de paramètres qui poussent pour le moment les acteurs traditionnels à préférer les blockchains privées ou permissionnées, comme le montre cette expérimentation.