À l’occasion de Surfin Bitcoin, la grande conférence française consacrée au Bitcoin (à Biarritz), The Big Whale a réalisé une liste des 10 pays les plus “bitcoin friendly”, c’est-à-dire de ceux dans lesquels il est le plus favorablement accueilli.
Nous n’avons évidemment pas produit cette liste à la “nageoire mouillée”. Avec l’aide d’experts, nous avons établi cinq critères essentiels sur lesquels chaque pays est passé au crible :
👉 Réglementation
👉 Fiscalité
👉 Talents locaux
👉 Maturité du marché
👉 Coût de l'énergie
Nous avons également attribué une note (entre 1 et 5 baleines, sachant que plus il y a de baleines, plus c'est positif) à chaque pays sur la base de ces critères.
ARGENTINE 🇦🇷 👉 Réglementation : 🐳
👉 Fiscalité : 🐳🐳🐳
👉 Talents locaux : 🐳🐳🐳🐳
👉 Maturité du marché : 🐳🐳🐳
👉 Coût de l’énergie : 🐳🐳🐳🐳
En dépit de son cadre réglementaire relativement flou, l’Argentine est l’un des fers de lance de l’écosystème Bitcoin dans le monde. Cette situation n’a rien d’un hasard : le pays subit une inflation endémique depuis les années 1980 (215% par an en moyenne !). Les Argentins fuient le peso et trouvent dans le bitcoin et les autres cryptomonnaies un moyen de contourner le durcissement du contrôle des changes qui tend à restreindre l’accès au dollar américain (traditionnellement utilisé pour protéger son épargne).
Comme The Big Whale l’a constaté sur place au printemps , les Argentins affectionnent également le bitcoin parce qu'il représente une alternative au système bancaire national. Près de 50% de la population n'a pas accès à un compte bancaire. Le bon niveau d'éducation de la population, notamment les ingénieurs, est aussi un facteur qui explique le niveau conséquent d'adoption du bitcoin et des cryptomonnaies.
La forte intervention du gouvernement dans l'économie facilite aussi l'implantation des cryptos. Il est relativement bon marché de miner des bitcoins, une activité gourmande en énergie, car le coût de l'électricité est maintenu à un niveau particulièrement bas par l’État. La société canadienne Bitfarms a investi 250 millions de dollars en 2021 pour construire à Cordoba l’une des plus grandes installations de minage au monde.
CORÉE DU SUD 🇰🇷 👉 Réglementation : 🐳🐳🐳🐳
👉 Fiscalité : 🐳🐳
👉 Talents locaux : 🐳🐳🐳🐳
👉 Maturité du marché : 🐳🐳🐳
👉 Coût de l’énergie : 🐳
Quand on parle du bitcoin, on évoque rarement la Corée du Sud. À tort ! Car le pays est sûrement l’un de ceux où le terreau est le plus fertile pour les cryptos. Outre le fait que plusieurs grands groupes comme Samsung investissent de plus en plus dans le secteur, les Sud-coréens sont très friands de nouvelles technologies et le taux d’adoption des cryptos dans la population adulte, certes encore modeste (environ 5%), ne cesse de progresser.
La stabilité du cadre réglementaire sud-coréen en fait aussi évidemment un pays favorable, même si les promesses fiscales du nouveau président élu ne sont pas sûres de se réaliser. Lors de la campagne au printemps, Yoon Seok-Youl s’était engagé à supprimer la taxation de 20% sur les plus-values en-dessous de 37.500 euros de gains, contre 1800 euros actuellement. Ce seuil de déclenchement pourrait finalement être moins avantageux que prévu.
En plus de ces deux éléments, la Corée du Sud dispose de nombreux talents, notamment dans la Tech, et de salariés bien formés.
ÉMIRATS ARABES UNIS 🇦🇪 👉 Réglementation : 🐳🐳🐳
👉 Fiscalité : 🐳🐳🐳🐳🐳
👉 Talents locaux : 🐳
👉 Maturité du marché : 🐳
👉 Coût de l’énergie : 🐳🐳🐳🐳
C’est la "Place" qui monte : en quelques mois, les Émirats arabes unis (principalement celui de Dubaï) se sont imposés comme l’une des nouvelles capitales du bitcoin. Ce changement de statut s’explique notamment par l'adoption récente d'un cadre réglementaire très favorable pour les entreprises. Plusieurs géants comme Binance, FTX et Crypto.com se sont installés dans le pays en 2022.
Outre le fait que les entreprises crypto peuvent désormais toucher une clientèle très aisée, elles profitent également d’une fiscalité particulièrement “douce” (moins de 10% d'impôts sur les sociétés). Pour les particuliers, elle est même nulle !
Les Émirats ont également la chance de ne pas manquer d’énergie, ce qui en fait un acteur potentiellement très attractif pour les mineurs de bitcoin. Des spécialistes américains, comme Crusoe Energy (connu pour son savoir-faire en récupération du gaz torché qui s’échappe des installations pétrolières et gazières à des fins de minage), ont signé en juin un accord à 350 millions de dollars avec le fonds souverain d’Abu Dhabi.
ÉTATS-UNIS 🇺🇸 👉 Réglementation : 🐳🐳🐳
👉 Fiscalité : 🐳🐳🐳
👉 Talents locaux : 🐳🐳🐳🐳
👉 Maturité du marché : 🐳🐳🐳
👉 Coût de l’énergie : 🐳🐳🐳🐳
Boostés par l’interdiction du minage en Chine en 2021, les États-Unis sont devenus l’épicentre de cette industrie à l'échelle mondiale. Selon l’Université de Cambridge, 38% de la puissance de calcul consacrée au minage vient des États-Unis, et notamment de quelques États comme la Géorgie, le Texas et le Kentucky où l’énergie (pétrole, gaz, éolien, solaire) est disponible à des prix hyper compétitifs.
D’autres États américains comme la Floride tirent leur épingle du jeu, notamment grâce à la ville de Miami, dont le maire Francis Suarez est un ardent défenseur du bitcoin. Pour donner l’exemple, l’édile reçoit son salaire en bitcoins (tout comme le nouveau maire de New York). Miami a également accueilli la plus grande conférence liée au bitcoin en avril 2022 (Bitcoin Miami).
La Californie est aussi un État avant-gardiste où l’on retrouve, à côté des papes de la Tech, des géants du secteur comme Coinbase ou Square, ainsi que des milliers d’ingénieurs particulièrement bien formés. Sans compter New York et la force de frappe de Wall Street, eux aussi très intéressés par le bitcoin.
Côté réglementation, les États-Unis ne disposent pas des mêmes standards que l’Europe, et, comme le soulignait récemment Jeremy Allaire (Circle) dans The Big Whale, le cadre réglementaire américain est encore très flou. L’administration Biden réfléchit actuellement à une réglementation crypto “ambitieuse” sur laquelle on reviendra très prochainement.
FRANCE 🇫🇷 👉 Réglementation : 🐳🐳🐳🐳
👉 Fiscalité : 🐳
👉 Talents locaux : 🐳🐳🐳🐳🐳
👉 Maturité du marché : 🐳🐳🐳
👉 Coût de l’énergie : 🐳
“La France dans le top 10 ?!” On entend déjà les commentaires de certains (on ne donnera pas les noms) sur le fait que l’Hexagone serait TOUT sauf un pays favorable au bitcoin. Et pourtant ! La sixième économie mondiale peut se targuer de lui offrir un terrain plutôt favorable, au moins sur quelques points.
Il y a d’abord le cadre réglementaire et politique très stable. La France a été l’un des premiers pays de la planète à se doter, en 2019, d’une législation avec la loi Pacte (création du statut de PSAN notamment) qui a même servi de modèle à la future réglementation européenne MiCA.
Le deuxième point concerne la maturité du marché. Le taux d’adoption des cryptos et du bitcoin se situe dans une fourchette haute (entre 7% et 10% de population selon les études) et la France dispose de nombreuses start-up liées au bitcoin (StackinSat, Bitstack, Acinq…) et de plusieurs acteurs de premier plan comme Ledger, qui n’est autre que le leader mondial de la conservation de crypto-actifs.
Le troisième et dernier point concerne justement tous les talents disponibles en France dans le secteur. Comme nous l’expliquait récemment Julien Bouteloup (StakeDAO, Curve, Stake Capital, etc.) dans une interview (disponible ici) , l’Hexagone est peut-être le pays qui dispose des meilleurs ingénieurs et développeurs de la planète. Cocorico ?
NIGERIA 🇳🇬 👉 Réglementation : 🐳
👉 Fiscalité : 🐳🐳
👉 Talents locaux : 🐳
👉 Maturité du marché : 🐳🐳🐳🐳
👉 Coût de l’énergie : 🐳🐳🐳🐳🐳
Le Nigeria se place systématiquement dans le top 10 des pays où il y a le plus grand nombre d’utilisateurs de cryptomonnaies. Selon la société d’analyses Chainalysis, il est même devant les États-Unis (mais derrière le Vietnam, l’Inde, le Pakistan et l’Ukraine). Pourquoi un tel succès ?
D’abord parce que les Nigérians se servent du bitcoin (et des cryptos) pour contourner leur système bancaire, très coûteux et limité, lorsqu’il s’agit d’effectuer des transferts d’argent vers l’étranger, et inversement ; la plupart des banques nigérianes limitent à 500 dollars le montant des devises que l’on peut sortir du pays.
Le bitcoin est également un instrument de plus en plus populaire au Nigéria auprès des entreprises qui commercent à l’international. Chainalysis cite notamment la multiplication des échanges commerciaux avec la Chine qui se font via des cryptos. Sans compter que le Nigeria est une grande puissance pétrolière, avec une énergie à faible coût (mais très carbonée) et donc une place intéressante pour les mineurs.
Confrontés à un contexte économique difficile, les Nigérians ont bien des raisons de plébisciter les devises virtuelles. En août, l’inflation a atteint 20%, son plus haut niveau depuis 2005. Quant à la monnaie nationale, le naira, elle ne cesse de chuter sur le marché parallèle, où 1 dollar s’échange désormais contre 670 nairas, tandis que la banque centrale maintient un taux de change artificiel de 1 dollar pour 420 nairas sur le marché officiel.
PORTUGAL 🇵🇹 👉 Réglementation : 🐳🐳
👉 Fiscalité : 🐳🐳🐳🐳
👉 Talents locaux : 🐳🐳🐳
👉 Maturité du marché : 🐳🐳🐳
👉 Coût de l’énergie : 🐳
Le Portugal est actuellement l'un des rares pays en Europe où les ventes de cryptos ne sont pas imposables, car elles ne sont pas considérées comme des devises ou des actifs financiers. Les particuliers n'ont pas non plus à s'acquitter de la TVA ou d'impôts sur les plus-values lors de leurs achats et ventes d'actifs (coucou la France 👋), et seules les activités professionnelles rémunérées en crypto-actifs sont taxées.
Dans l'attente de nouvelles règles fiscales (le gouvernement a annoncé en mai vouloir mettre fin à ce statut privilégié… avant de le repousser à plus tard), les investissements en cryptomonnaies continuent de gagner du terrain notamment dans le secteur de l'immobilier avec la première vente d'un appartement payé en bitcoin, sans conversion en euros, réalisée début mai. Rendues possibles grâce à une nouvelle réglementation de l'Ordre des notaires approuvée fin avril, ces transactions immobilières pourraient voir arriver une nouvelle population. De nombreux développeurs et porteurs de projets européens s’y sont d’ailleurs installés.
SUISSE 🇨🇭 👉 Réglementation : 🐳🐳🐳🐳
👉 Fiscalité : 🐳🐳🐳🐳
👉 Talents locaux : 🐳🐳
👉 Maturité du marché : 🐳🐳🐳
👉 Coût de l’énergie : 🐳
De l’autre côté des Alpes, la Suisse est probablement l’un des pays européen les plus avancés. Celui-ci dispose d’un cadre réglementaire simple et d’un écosystème très dynamique. Dans le canton de Zoug (à 20 minutes de train de Zurich), la “Crypto Valley” attire de nombreux entrepreneurs qui plébiscitent son cadre pro-business. Des centaines de start-up crypto (aussi beaucoup de boîtes aux lettres) se sont installées ces dernières années à Zoug ; Neuchâtel, Lausanne, Genève et Lugano offrent elles aussi un terrain réglementaire attractif.
Sur le plan bancaire, plus de la moitié des établissements helvétiques estiment que les cryptomonnaies deviendront une catégorie de placement classique d'ici 10 ans, au même titre que les actions et obligations, selon un baromètre du cabinet EY publié en début d’année. La start-up crypto Seba dispose quant à elle d’une licence bancaire depuis 2019, une première dans le monde.
Le régime fiscal de la Suisse en matière de cryptomonnaies est très avantageux par rapport à ses voisins européens. En effet, les plus-values issues de la vente de cryptomonnaies ne sont pas imposables pour les particuliers. Du côté des professionnels, les taux d'imposition appliqués à ces gains sont nettement inférieurs à ceux des autres pays. Et à Zoug, on peut payer ses impôts en… bitcoins.
“La Suisse a décidé de ne pas voter de nouvelles lois pour encadrer le bitcoin, il est seulement réclamé aux acteurs de respecter le cadre actuel”, indique Alexis Roussel, cofondateur de la plateforme d’échange Bity. “La Suisse est une population généralement éduquée sur l'argent, méfiante de tout ce qui est centralisé, je pense que le succès local du Bitcoin a des explications culturelles”, souligne-t-il.
SALVADOR 🇸🇻 👉 Réglementation : 🐳🐳
👉 Fiscalité : 🐳🐳🐳🐳🐳
👉 Talents locaux : 🐳
👉 Maturité du marché : 🐳🐳🐳
👉 Coût de l’énergie : 🐳🐳🐳🐳
Comment ne pas citer le Salvador ? Il y a tout juste un an, ce petit pays d’Amérique centrale faisait les gros titres en devenant le premier État à faire du bitcoin sa monnaie légale. Depuis, s’il n’y a pas eu de grand soir de la crypto (loin de là), le gouvernement a toutefois fait adopter une série de mesures qui font que le Salvador (6,5 millions d’habitants) figure parmi les pays les plus “accueillants”.
Le premier atout du Salvador est sa fiscalité “stable”, ou plus précisément quasi-inexistante. Au Salvador, mais ce n’est pas le seul pays, les plus-values en crypto sont exonérées d’impôt sur le revenu. Le but de cette mesure est assez simple : attirer les start-uppers et investisseurs crypto, et par ricochet développer l’économie locale. Hasard ou pas, le tourisme au Salvador a fortement progressé ces derniers mois, et a retrouvé son niveau d’avant Covid, selon l’organisation mondiale du tourisme.
Pour aller plus loin, le président du pays, Nayib Bukele, travaille aussi sur la création d’une “Bitcoin City” salvadorienne, totalement dédiée au bitcoin, où il n’y aurait aucune taxe : pas d’impôt sur le revenu, pas d’impôt foncier, pas d’impôt sur le capital… Ce projet de ville située dans l’Est du pays, qui rappelons-le est l’un des plus violents au monde, serait alimentée en énergie par le volcan Conchagua qui pourrait fournir une énergie abondante.
C’est justement le deuxième atout du Salvador : le prix de son énergie. Si aucun chiffre officiel n’est disponible, le Salvador peut s’appuyer sur une trentaine de volcans - une vingtaine serait en activité selon le gouvernement. Selon les chiffres avancés par le gouvernement, le prix du kilowattheure pourrait descendre en dessous de 0,05 dollar, contre 0,2 dollar en France.
SINGAPOUR 🇸🇬
👉 Réglementation : 🐳🐳🐳🐳
👉 Fiscalité : 🐳🐳🐳🐳
👉 Talents locaux : 🐳🐳🐳🐳
👉 Maturité du marché : 🐳🐳🐳
👉 Coût de l’énergie : 🐳
Place financière de référence en Asie du Sud-Est, Singapour s’est depuis longtemps bâti une réputation de “hub” de l’industrie crypto, notamment grâce à son cadre réglementaire favorable. La cité-État héberge les sièges de certaines grandes entreprises du secteur (Crypto.com principalement) et aussi pléthore de fonds d’investissement.
Singapour a récemment fait parler de lui (pas qu’en bien) parce que plusieurs acteurs liés au crash récent des cryptos, Terra Luna et Three Arrows Capital, étaient installés là-bas. En réaction et pour protéger sa réputation, la banque centrale du pays a promis d’être "brutale et particulièrement dure" avec les acteurs ne présentant pas les garanties suffisantes. Des géants du secteur comme les plateformes d’échange Binance ou Bybit ont récemment choisi de faire l’impasse sur cette juridiction pour s’éviter les foudres potentielles des autorités.
En dépit de ce durcissement à venir, le pays reste une place de choix avec une main d'œuvre très qualifiée. La plus grande banque du pays, DBS, a lancé une plateforme d’échange. Côté minage, Singapour n’est pas une destination recommandée pour cette activité. L'électricité y est chère, tandis que la chaleur et l’humidité de l’environnement renchérissent les coûts.